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Apprentissage à distance : une minoration… et une définition en filigrane ?

Cette révolution de l’apprentissage à distance : une minoration choquante à découvrir !

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La loi de finances pour 2025 pave le chemin vers une évolution du financement des Centres de Formation d’Apprentis (CFA), en prenant en compte le recours à la formation à distance. La mise en œuvre de cette mesure requiert un décret qui soulève des questions juridiques et pratiques sur la définition même de l’apprentissage, selon Fouzi Fethi, responsable du pôle Droit et politique de formation à Centre Inffo.

Le 30 avril dernier, le gouvernement a annoncé plusieurs nouvelles mesures, dont l’une suscite particulièrement l’attention : dès le 1er juillet 2025, les formations en apprentissage dont plus de 80 % se déroulent à distance verront leur financement réduit de 20 %.

Derrière cette décision, motivée par des impératifs budgétaires, se dessinent des préoccupations juridiques et pédagogiques. En quantifiant l’enseignement à distance, l’apprentissage, sous sa forme numérique, pourrait-ils se rapprocher de la formation continue ? Il est essentiel d’interroger comment établir de manière précise si une formation dépasse réellement le seuil des 80 % en distanciel au sein du parcours de l’apprenti.

Sémantique incertaine, une frontière floue ?

Cette mesure, issue de la loi de finances pour 2025, exige un décret d’application dont l’élaboration risque d’être complexe, tant le texte actuel laisse place à une certaine ambiguïté sémantique.

En effet, la rédaction proposée par le Code du travail, dans son article L. 6332-14, fait mention de la possibilité de moduler les financements lorsque « la réalisation des actions de formation implique des modalités de formation à distance ».

Peut-on y voir une simple imprécision ou une intention de brouiller la frontière entre apprentissage et action de formation ?

Deux logiques de formation historiquement séparées

Historiquement, ces deux modes de formation étaient bien différenciés. L’« action de formation » est définie comme un « parcours pédagogique visant à atteindre un objectif professionnel » (Art. L. 6313-2 C. trav.), tandis que l’apprentissage repose sur une « éducation alternée », combinant enseignements théoriques au CFA et formation pratique en entreprise (art. L. 6211-2 C. trav.).

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Cette alternance structure le modèle économique et social de l’apprentissage, intégrant des missions d’accompagnement et de coordination, qui vont bien au-delà des seules coûts pédagogiques.

Un financement global, indépendamment de la durée de l’enseignement

Dans cet esprit, le versement des niveaux de prise en charge (NPEC) par l’opérateur de compétences (Opco) est basé sur la durée du contrat d’apprentissage, et non simplement sur les heures de cours suivies.

Contrairement à la formation continue, le CFA n’est pas financé uniquement sur la durée de ses enseignements, mais pour l’ensemble de ses missions, incluant orientation, recherche d’employeur, coordination entre formateurs et maîtres d’apprentissage, sans oublier les exigences qualité liées à la certification Qualiopi (art. D. 6332-78 C. trav.).

Une réduction de 20 % : une perspective délicate

Imposer une minoration de 20 % fondée sur un critère quantitatif comme le taux de formation à distance viendrait modifier ce modèle, en rapprochant le système d’une logique plus proche de celle de la formation continue.

Mesurer le distanciel : un défi financier

Pour appliquer cette minoration, il faudra déterminer la proportion des enseignements à distance dans le cursus de l’apprenti.

C’est ici que les contours deviennent flous.

Alors que la formation continue a des garde-fous pour réguler les modalités à distance — tels que l’obligation d’un accompagnement technique et pédagogique, des informations sur les activités et le temps imparti pour les réaliser, ainsi que des évaluations intermédiaires ou finales (art. D. 6313-3-1 du C. trav.) — l’apprentissage, quant à lui, reste silencieux sur ce sujet.

Des critères de mesure manquants

Comment un CFA qui offre une formation hybride pourrait-il évaluer objectivement cette part de formation à distance ? Devra-t-il se baser sur le volume d’heures prévu dans le référentiel ou sur celles réellement suivies par l’apprenti ?

Serait-il nécessaire de faire une distinction entre les cours en ligne synchrones, où l’apprenant interagit directement avec son formateur, et les cours asynchrones, accessibles à tout moment ?

À quel moment l’Opco devra -t-il se prononcer sur la minoration : lors du dépôt du contrat ou à la facturation ? Et surtout, quels outils disposera-t-il pour contrôler la conformité avec cette réduction ?

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Ces questions, bien que techniques, auront des répercussions concrètes.

Un cadre juridique encore à construire

Actuellement, le Code du travail reconnaît la formation à distance dans l’apprentissage, mais sans en donner une définition précise. Cette lacune juridique complique la mise en œuvre de la minoration et représente un risque sur le plan légal.

Doit-on alors importer les critères de la formation continue pour établir une base commune ? Si c’est le cas, cela impliquerait de rapprocher deux types de prestations historiquement et légalement distincts — une évolution qui pourrait redéfinir les contours mêmes de l’apprentissage.

Une mesure budgétaire aux implications plus larges

Par conséquent, ce qui pourrait sembler être une simple mesure budgétaire révèle en réalité des enjeux bien plus importants, tant sur le plan juridique qu’opérationnel.

La question se pose alors : jusqu’où ira le futur décret ? Sera-t-il en mesure de préciser la méthode pour mesurer la part d’enseignements à distance dans un cursus d’apprentissage, ce qui nécessiterait de définir ce que constitue l’enseignement à distance ?

Avec une mise en application prévue pour le 1er juillet 2025, le délai approche. Reste à savoir si ce laps de temps sera suffisant pour rédiger un décret équilibré, conciliant impératifs budgétaires, juridiques et opérationnels.

 


Le thème de la qualité de l’apprentissage et de sa régulation financière sera discuté lors de la Grande journée de l’apprentissage, organisée par Centre Inffo le 24 juin prochain :

CFA, Opco, entreprises : quelle réforme du financement et de la régulation de l’apprentissage ?

 

 

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